36 : Lundi 4 mai 2020  


      Chim ne m’emmène plus aux rochers du Port sec parce que je me frite avec les chats sauvages qui ne veulent pas partager leur repas. Alors, comme la semaine dernière, je continue à parcourir les rues de Bonneveine et de la Pointe rouge. 

       Vous voyez le boulevard de Hambourg ? Vous seriez surpris de savoir qu’il en part de nombreux petits passages de presque 1m de large qui séparent des opérations immobilières récentes.  Ils me plaisent beaucoup, car leur étroitesse concentre les odeurs. 
      Au hasard : ici un parfum de fleur, enrichi de pipi, sollicite mon apport perso ; plus loin un relent de pizza révèle une part pré-mordue encore consommable ;  là, un arbrisseau  a attiré mes congénères jusqu'à dessiccation ; là-bas, derrière un portail, filtre une odeur de poulet grillé ;   le long d'un mur, une âcre trace sinueuse trahit le passage d'un chat ;  une fourche de scooter brûlé achève de se rouiller ;  au soleil, le cadavre d'un scarabée arrive au faîte de sa décomposition. En fait, je rencontre, dans ces  boyaux étroits, tout un panel bigarré d'odeurs de vie et de transformation. De lente digestion des choses.
        Méfiance !!!  Au centre du passage, une senteur de musc brûlant révèle un chien très agressif. Il faut se méfier des chiens qui  marchent au milieu d'une rue : soit ils sont fous et se font vite écraser, soit ils cherchent la cogne. Je me battrais volontiers, mais c'est impossible avec Chim. Il surveille et interdit.... C'est un peu soulageant aussi.

        Au long du parcours, on voit de plus en plus de gens assis, désoeuvrés puisque tout est fermé, jeunes et moins jeunes, qui parlent entre eux et qui parlent à ceux qui passent.  Ils adressent à moi et à Chim des paroles aimables, comme de bienvenue. Décidément le monde change. Le confinement provoque une envie de communiquer.  Chim me dit que ça ressemble à l'Afrique où quand on arrive dans un village tout les monde vous accueille par quelques mots (mais là, c'est le dénuement qui rapproche les humains, pas le corona...) 

          Devant cette nouvelle sociabilité due au virus, mon Maître, très savant, me dit que dans son association d'architectes retraités, on cite parfois cette phrase latine : Virtus junxit, mors non separabit , la vertu unit, la mort ne sépare pas. Je crois plutôt que c'est : Virus junxit, mors non separabit,  le virus nous unit ...

               Dans une ruelle, en plein milieu, je me suis trouvé nez à nez, si on peut dire, avec un carton de pack de bière. Deux voitures derrière se sont arrêtées pour laisser Chim faire une photo. Puis les conducteurs curieux sont descendus à leur tour. Pour voir ce que  Chim regardait. Puis leur famille aussi. Pour voir ce que tout le monde regardait.  
                C'est Marseille

                                    


           A Ouaouh !!!






Commentaires

  1. Essayant de courir le plus souvent possible dans un rayon d'1km autour de mon appartement et pour une heure seulement, j'ai parcouru, comme toi, toutes les rues de mon quartier, que je ne connaissais pas et les tours de paté de maison n'ont plus de secret pour moi. Je suis devenue à ce point performante dans la gestion et l'optimisation de la durée de mes sorties que la dernière a duré : 59' et 10" !!! histoire d'en profiter au maximum !!! A bientôt. AC.

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